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Intensive Care Medicine

Tutoriel 341

Diagnostic et prise en charge du coup de chaleur

Dr. Adam Burt
Clinical Fellow, Intensive Care, Royal Cornwall Hospital NHS Trust, UK

Edited by
Dr. William English
Consultant in Anaesthesia and Intensive Care
Royal Cornwall Hospital NHS Trust, UK

Correspondance: atotw@wordpress-1154955-4022140.cloudwaysapps.com

15 Nov 2016

QUESTIONS

Avant de continuer, essayez de répondre aux questions suivantes. Les réponses se trouvent à la fin de l’article, ainsi qu’une explication. Répondez, s’il vous plait, par Vrai ou Faux:

  1. En ce qui concerne la dissipation thermique et la thermoregulation:
    1. Le corps humain dissipe la chaleur par quatre mécanismes : l’évaporation, la conduction, la convection et la radiation
    2. Le refroidissement par conduction peut être facilité par une augmentation de la vitesse de circulation de l’air sur la peau.
    3. L’augmentation du gradient de pression de l’eau entre la peau et l’environnement facilite le refroidissement par évaporation.
    4. La convection est la forme la plus efficace de perte de chaleur par le corps
    5. Le contrôle central de la thermorégulation se situe au niveau de la moelle
  2. En ce qui concerne le diagnostic de coup de chaleur:
    1. Une température >40ºC est requise pour faire un diagnostic de coup de chaleur
    2. L’hypotension est une caractéristique essentielle du coup de chaleur
    3. Un trouble du comportement est une caractéristique essentielle du coup de chaleur
    4. Un athlète court un semi-marathon par une journée inhabituellement chaude. Après la course, il souffre de faiblesse, de nausées et vomissements puis il s’effondre. Cette histoire est compatible avec un diagnostic de syncope thermique.
    5. Les patients qui présentent un coup de chaleur sont presque toujours tachycardes.
  3. En ce qui concerne les facteurs de risque et le traitement du coup de chaleur:
    1. Le Dantrolène est un traitement efficace du coup de chaleur
    2. Les diurétiques sont associés au coup de chaleur
    3. Le sexe féminin est protégé contre les coups de chaleur
    4. Le Paracétamol est un traitement efficace pour les coups de chaleur
    5. Le refroidissement actif devrait s’arrêter à 37.5°C

Points clés

  • Le coup de chaleur a un taux de mortalité compris entre 10-50%.
  • Les principales manifestations sont une température corporelle centrale > 40°C et des troubles du système nerveux central.
  • Les patients souffrant d’un coup de chaleur peuvent avoir une température centrale normale à l’arrivée à l’hôpital s’ils ont eu un refroidissement pré-hospitalier efficace.
  • Les piliers du traitement sont un refroidissement rapide et des soins de soutien. Un soutien à plusieurs organes peut être requis.
  • Il existe différentes options de refroidissement. Le choix dépendra du climat local, de la disponibilité et de l’expérience.

INTRODUCTION

Malgré une description originale datant de plus de 2000 ans1 les processus physiopathologiques complexes à la base des maladies liées à la chaleur y compris le coup de chaleur ne sont pas encore complètement compris. Le coup de chaleur est une situation grave à travers le monde, et on rapporte un taux de mortalité entre 10-50%. En plus, 7-20% des survivants garderont des lésions définitives2,3. Les principales manifestations du coup de chaleur sont une température corporelle centrale >40ºC et des troubles du système nerveux central. Cet article décrira les différents termes utilisés pour décrire les maladies liées à la chaleur. Les facteurs de risque, la prévention, le diagnostic et le traitement de cet important groupe de maladies seront ensuite discutés.

MALADIES LIÉES A LA CHALEUR

Plusieurs termes sont utilisés pour décrire les maladies variées liées à la chaleur. On a pu argumenter que plusieurs de ces situations n’étaient pas des entités distinctes, mais plutôt des situations liées dans un même spectre2,4-6. Le coup de chaleur est la forme la plus sévère d’un nombre de maladies liées à la chaleur et à la défaillance des mécanismes homéostatiques normaux. Le coup de chaleur classique non causé par l’exercice se réfère au coup de chaleur résultant d’une température ambiante élevée et à l’humidité. Le coup de chaleur causé par l’exercice est la conséquence d’un excès de production de chaleur pendant une activité intense2,3.

Tableau 1.

Tableau 1. Définitions des maladies liées à la chaleur 4,5,7

Thermorégulation normale

Les êtres humains sont des organismes homéostatiques. Le fonctionnement optimal des enzymes requiert que la température corporelle soit maintenue dans une fourchette étroite autour de 37°C. La chaleur corporelle est obtenue à partir de l’environnement et du métabolisme cellulaire. La thermorégulation est contrôlée par l’hypothalamus et le système nerveux autonome. Ce contrôle s’effectue via plusieurs mécanismes physiologiques. Il s’agit de modifications du tonus vasculaire (qui entrainent des changements du débit sanguin et de la distribution du sang), du frisson et de la transpiration.2,4,5 La dissipation de la chaleur se produit via 4 processus : l’évaporation, la conduction, la convection et la radiation.2,5 L’évaporation de la sueur est la méthode la plus efficace de perte de la chaleur ; cependant ce mécanisme devient moins efficace quand la température de l’air se rapproche de la température corporelle. L’absence de transpiration se voit plus souvent au cours du coup de chaleur non causé par l’exercice qu’au cours du coup de chaleur causé par l’exercice au cours duquel la transpiration peut persister.4 La perte de chaleur par conduction peut être largement augmentée par une immersion dans de l’eau plus froide que la température corporelle.
En plus de la transpiration, les réponses physiologiques normales à l’hyperthermie associent des augmentations du volume minute, de la fréquence cardiaque et du volume d’éjection. Le volume d’éjection peut augmenter 4 fois. Le sang est redirigé du centre vers la périphérie. Ceci peut réduire la perfusion viscérale de manière significative et tout particulièrement au niveau intestinal et rénal. Les comorbidités et les médicaments qui réduisent les capacités individuelles à rediriger le sang vers la périphérie pourront augmenter la susceptibilité au coup de chaleur. (voir ci-dessous les facteurs de risque).2,4

Physiopathologie

La conception actuelle est que le coup de chaleur est causé par une défaillance de la thermorégulation conduisant à l’hyperthermie et à un syndrome de réponse inflammatoire systémique (SIRS). Ceci peut conduire à une défaillance multiviscérale que l’on pensait jusque-là liée à des lésions tissulaires directes causes par l’hyperthermie. Alors que les dommages tissulaires par lésion thermique directe surviennent à des températures >46°C, le métabolisme et la réponse inflammatoire sont affectés à des températures plus basses (42-44°C).5,8 Il semble maintenant probable que les différentes manifestations du coup de chaleur sont dues à la combinaison à la fois des lésions thermiques et du SIRS. On a remarqué que les séquelles du coup de chaleur sont similaires à celles du SIRS, mettant en jeu des interactions complexes entre les cytokines pyrogènes, les interleukines, les cellules endothéliales, les endotoxines, leTNF-α et des facteurs de coagulation2,3,5,8. Une susceptibilité génétique au coup de chaleur a également été suggérée, avec des différences dans l’expression des gènes codants les protéines de coagulation, les cytokines et les protéines de chocthermique expliquant probablement pourquoi certains individus peuvent développer un coup de chaleur et d’autres non. Un schéma simplifié de la physiopathologie du coup de chaleur est présenté dans la figure 1.

Figure 1.

Figure 1. Diagramme présentant les évènements qui conduisent au coup de chaleur8 NEHS = non exertional heat stroke (coup de chaleur non causé par l’exercice), EHS = Exertional heat stroke (coup de chaleur causé par l’exercice), SIRS = Systemic inflammatory response syndrome (syndrome de réponse inflammatoire systémique), MOF = Multi organ failure (défaillance multiviscérale).

FACTEURS DE RISQUE

Plusieurs facteurs de risque peuvent conduire au coup de chaleur (Tableau 2 and 3). Le coup de chaleur non causé par l’exercice s’observe habituellement pendant les vagues de chaleur. Les sujets particulièrement à risque sont ceux aux âges extrêmes, les personnes socialement isolées, et les gens participant à des larges rassemblements comme ceux assistant au Hajj, en Arabie Saoudite. Au contraire, le coup de chaleur causé par l’exercice est typiquement décrit chez des gens en bonne santé qui ont fait un exercice intense, y compris des militaires en tenue de combat ou en combinaison de protection. Les victimes de l’EHS n’ont souvent pas été acclimatées aux conditions ou à la charge de travail.5 Les facteurs environnementaux, les facteurs physiques et les différentes classes de médicaments qui prédisposent au coup de chaleur sont présentés dans les Tableau 2 et 3 respectivement. La transpiration peut conduire à des pertes hydriques jusqu’à deux litres par heure avec des pertes de sel. La déshydratation et la déplétion sodée qui en résultent sont connus pour compromettre ensuite la thermorégulation.2 Le sexe féminin semble être un facteur protecteur contre le coup de chaleur causé à l’exercice. Les raisons ne sont pas connues. Les théories citent un effet protecteur des oestrogènes, un seuil plus bas de déclenchement des mécanismes de thermorégulation ou le fait que les femmes génèrent moins de chaleur que les hommes à cause de leur plus petite masse musculaire.4

Tableau 2.

Tableau 2. Facteurs de risques environnementaux et physiques prédisposant au choc thermique4,5,7

Tableau 3.

Tableau 3. Agents prédisposant au choc thermique 4,5,7 (SCV= système cardiovasculaire, SNC = système nerveux central)

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Les principales caractéristiques du coup de chaleur sont l’hyperthermie et les troubles du système nerveux central. Cependant, il est important de garder de fort soupçon de coup de chaleur, étant donné que des patients présentant un coup de chaleur peuvent arriver à l’hôpital avec une température <40°C si un refroidissement efficace a eu lieu en pré-hospitalier.5 Le coup de chaleur peut aussi toucher plusieurs organes et systèmes comme cela sera décrit ci-dessous. Un contexte d’exposition à un temps chaud ou une activité intense peuvent aider à faire le diagnostic, mais des causes importantes telles qu’un sepsis, des réactions à des médicaments et des maladies tropicales devraient toutes être exclues. Un autre diagnostic différentiel important à faire, surtout en cas de coup de chaleur causé par l’exercice en climat chaud, est l’hyponatrémie secondaire à une intoxication hydrique. Une installation rapide d’une hyponatrémie peut conduire à des troubles de conscience et des convulsions, mimant des signes de dysfonction du système nerveux central que l’on peut observer lors d’un coup de chaleur. Cependant la différence avec un coup de chaleur peut habituellement être faite dans un contexte d’absorption massive de liquide, avec un pouls normal, une température normale, une polyurie et une normotension ou une hypertension. 5

Manifestations sur le système nerveux central

Les troubles du SNC sont attribués à une possible combinaison d’oedème cérébral, d’ischémie cérébrale et de désordres métaboliques.4,5 Il existe une large gamme de gravité des manifestations sur le système nerveux central. Il s’agit d’irritabilité, de délire, d’encéphalopathie et de coma. Des convulsions peuvent survenir et de manière surprenante elles sont souvent observées pendant le refroidissement.2,3 Une hyperventilation soutenue peut conduire à une tétanie.4,5 Le cervelet est particulièrement vulnérable au coup de chaleur et une atrophie du cervelet a été retrouvée sur l’imagerie par résonnance magnétique plusieurs mois après le coup de chaleur initial. 9

Manifestations sur le système cardiovasculaire

Le système cardiovasculaire participe à la thermorégulation normale et la dissipation de la chaleur par la redistribution du sang. La redistribution du sang est souvent compromise au cours du coup de chaleur et par conséquent, l’efficacité de ce mécanisme est perdue.4 A moins qu’il n’y ait des anomalies physiologiques ou des facteurs pharmacologiques en jeu, tous les patients souffrant d’un coup de chaleur sont tachycardes. Tachyarythmies et hypotension sont habituelles. L’hypotension est de nature multifactorielle. Elle est souvent la conséquence de la combinaison de la déshydratation et de la vasodilatation périphérique, celle-ci est causée par la production accrue d’oxyde nitrique.2,4 L’hypotension nécessitant des vasopresseurs est associée à une augmentation de la mortalité et à un plus mauvais prognostic neurologique. 10 Des modifications de l’ECG sont habituelles et se rencontrent chez 85% des patients souffrant de coup de chaleur dans une des séries publiées.11 Les anomalies le plus souvent observées sont des tachycardies sinusales (43-79%) et des allongements de l’espace QT (61%).4,11,12 Des modifications non spécifiques et spécifiques du segment ST associées aux territoires d’artères coronaires ont été décrites, ainsi que des troubles de conduction, tels que des blocs de branche droite incomplet et complet.11,12

Manifestations respiratoires

La tachypnée conduit à une augmentation du volume minute et la gazométrie artérielle le réflète. Au cours du coup de chaleur causé par l’exercice, on observe d’abord une alcalose respiratoire. Elle peut évoluer vers une acidose métabolique et une hyperlactatémie secondaire aux dommages tissulaires.2,4,5 Par contre, le patient qui souffre d’un coup de chaleur non causé par l’exercice présente classiquement une alcalose respiratoire isolée.2 Des cas graves de coup de chaleur peuvent présenter un oedème pulmonaire, un infarctus pulmonaire ou un syndrome de détresse respiratoire aigu qui exigent une sédation, une intubation et la mise en route d’une ventilation mécanique. 4,5

Manifestations gastrointestinales.

Les lésions hépatiques et intestinales sont causées à la fois par les lésions thermiques directes et par la baisse du débit splanchnique, cette baisse étant due au shunt préférentiel du sang vers la périphérie. L’augmentation de la perméabilité intestinale peut permettre le passage des endotoxines dans la circulation, exacerbant alors la réponse inflamatoire.2,4 Alors que les tests hépatiques sont habituellement perturbés, une insuffisance hépatique fulminante est une complication rare mais très grave.

Manifestations rénales

lésions rénales au cours du coup de chaleur sont multifactorielles. L’hypovolémie, la rhabdomyolyse et la coagulation intravasculaire disséminée sont les potentiels facteurs contributifs. Les niveaux de créatinine kinase sont élevés aussi bien dans le coup de chaleur causé par l’exercice que dans le coup de chaleur non causé par l’exercice,bien que ce niveau soit plus élevé dans ce dernier cas.4 Différents taux de prévalence de l’insuffisance rénale aigue ont été décrit, avec une fréquence plus élevée au cours du coup de chaleur causé par l’exercice. 4,5

Manifestations métaboliques

Les troubles électrolytiques qui surviennent lors d’un coup de chaleur ont bien été décrits chez les patients atteints d’un coup de chaleur causé par l’exercice. On a pensé que la même image s’observe lors du coup de chaleur non causé par l’exercice.4 L’hypercalcémie et l’hyperalbuminémie peuvent se développer suite à la déshydratation.2 L’hypokaliémie et l’hypophosphatémie sont habituelles lors d’un coup de chaleur et on pense qu’elles seraient secondaires aux pertes par sudation, aux effets des catécholamines et de l’hyperventilation. L’hyperkaliémie et l’urémie surviennent plus tard et une dialyse peut être indiquée.2,4,5 La poursuite des lésions cellulaires entraînent une fuite de phosphate vers le secteur extracellulaire. Là, il se lie au calcium et est la cause d’une hypocalcémie et d’une hyperphosphatémie.

Manifestations hématologiques

On observe habituellement une polyglobulie causée par la déshydratation. Le métabolisme cellulaire et les réactions enzymatiques sont perturbés à des températures de 42-44°C.5,8 Ceci comprend une activation directe des plaquettes conduisant à des microthromboses. Une coagulopathie de consommation peut survenir qui à son tour peut majorer les saignements. La présence d’une coagulopathie de consommation est un indicateur de mauvais pronostic.8

PRÉVENTION

Il existe plusieurs mesures préventives qui peuvent être prises pour minimiser les risques de coup de chaleur. L’éducation et l’entrainement des sujets à risque sont très importants, de même que le maintien de l’hydratation et la compensation des pertes électrolytiques pendant les temps chauds ou lors de la réalisation de tâches harassantes. Des vêtements adaptés, des équipements et des modifications des tâches peuvent aussi minimiser les risques de coup de chaleur.5 L’acclimatation ou adaptation physiologique à un nouvel environnement peut aussi jouer un rôle. Les adaptations les plus importantes se produisent au cours des 10-14 premiers jours, bien que cela puisse prendre jusqu’à deux mois. Les adaptations utiles comprennent la transpiration et l’expansion du liquide intravasculaire. Cette dernière aide à réduire la demande et la réponse cardiovasculaire qui sont nécessaires lorsque la température corporelle est élevée.5

TRAITEMENT

Comme pour toutes les urgences médicales, les patients suspects d’un coup de chaleur doivent avoir une évaluation rapide de l’état des voies respiratoires, de la respiration, de la circulation et de l’état neurologique. Une oxygénothérapie à haut débit doit être mise en place et un abord veineux doit être installé. La température rectale devrait être enregistrée au cours de l’évaluation initiale si possible.4,5,13 Les piliers du traitement après que des diagnostics alternatifs aient été écartés sont le refroidissement rapide et, quand indiqué, la suppléance des fonctions vitales.2 Une discussion détaillée de la suppléance d’organes multiples est au-delà de la portée de cet article, mais les mêmes principes s’appliquent dans le traitement des patients avec ou sans coup de chaleur. Un résumé de la prise en charge du coup de chaleur est présenté dans la figure 2.

Méthodes de refroidissement

L’objectif du refroidissement est de dissiper rapidement la chaleur du noyau corporel vers l’extérieur sans créer une vasoconstriction cutanée ou des frissons.2 Augmenter le gradient de pression d’eau entre la peau et l’environnement facilite le refroidissement par évaporation. Augmenter le gradient de température entre les deux contribue au refroidissement par conduction. Le refroidissement par convection peut être amélioré par une augmentation de la vélocité du flux d’air sur la peau.2                                                                                                                                                                                                                                                                                            Il est largement rapporté que la durée et la gravité de l’hyperthermie affectent les résultats.5,13,14 Des études menées dans les hôpitaux urbains ont démontré que le refroidissement à moins de 38,9 ° C dans les trente à soixante minutes d’arrivée à l’hôpital améliore la survie.4,13 Un refroidissement prompt et rapide devrait commencer dès que l’on suspecte un coup de chaleur. Certains experts recommandent que le refroidissement actif cesse à 39°C pour éviter de provoquer une hypothermie, mais cela dépend des méthodes de refroidissement utilisées.5
Traitement pré-hospitalier
Dès que possible, le patient doit cesser toute activité, être mis à l’ombre, être débarrassé de vêtements en excès, aspergé d’eau froide et continuellement ventilé. Des sacs de glace doivent être placés au cou, aux aisselles et aux aines.2,13
Traitement intra-hospitalier
Il existe encore un débat sur la méthode de refroidissement la plus efficace.2,4,5,13,14 L’immersion dans l’eau glacée ou froide et les techniques par évaporation sont deux des techniques de refroidissement les plus largement utilisées.13

Immersion dans l’eau glacée

L’immersion dans l’eau glacée s’est avérée être la méthode la plus efficace pour le refroidissement rapide des patients souffrant de coup de chaleur causé ou non par l’exercice.5,10,13 La sélection des patients est importante et cette technique peut être la plus appropriée pour les patients souffrant d’un coup de chaleur causé par l’exercice qui, en général, sont jeunes, en bonne santé et sont athlètes ou militaires. Cependant, cette technique nécessite un équipement spécial qui n’est souvent pas disponible. En outre, même lorsqu’il est disponible, il existe un certain nombre de problèmes potentiels. Il est souvent mal toléré par les patients, nécessite un grand nombre de personnel et interfèreavec la surveillance et la réanimation du patient. 4,13 Les complications associées à l’immersion dans l’eau glacée se sont révélées plus répandues chez les patients âgés souffrant de coup de chaleur non causé par l’exercice.10 Des recherches ont été menées sur la vitesse de refroidissement observé avec différentes températures de l’eau, allant de l’eau glacée (2°C) à l’eau tiède (20°C). Malgré un refroidissement significativement plus rapide observé avec l’utilisation d’eau glacée,13 il n’y a toujours pas de consensus sur la température optimale de l’eau utilisée dans le refroidissement par immersion. Notre point de vue est que si l’eau glacée n’est pas disponible ou que son utilisation risque d’être mal tolérée, alors un refroidissement à l’eau tiède devrait être utilisé. Placer seulement les mains et les pieds du patient dans de l’eau glacée peut être une alternative efficace à l’immersion du corps entier.5

Techniques d’évaporation

Les techniques d’évaporation sont moins exigeantes en main-d’oeuvre. Elles impliquent d’enlever les vêtements des patients et de pulvériser de l’eau sur le patient ou de couvrir le patient avec une feuille de gaze imbibée et puis continuellement ventiler de l’air chaud sur la peau.13 L’eau tiède ou chaude doit être utilisée pour éviter la vasoconstriction. Masser la peau a également été préconisé pour aider à surmonter la vasoconstriction.2,13 Bien que les techniques d’évaporation n’aient pas la même efficacité que l’immersion dans l’eau glacée, elles peuvent être mises en marche rapidement sans avoir besoin de matériel spécialisé, d’une formation ou d’un grand nombre de personnel.14 Ces techniques ont également moins de complications et sont mieux tolérées par les patients. Une unité de refroidissement du corps, qui utilise le principe du refroidissement par évaporation, a été produite, mais aucune différence de temps de refroidissement n’a été observée lorsque celle-ci a été comparée à la couverture du patient dans une feuille humide et à l’aide de ventilateurs.13, 15
L’utilisation de blocs de glace placés sur les gros vaisseaux superficiels peut être facilement appliquée dans l’environnement pré-hospitalier. Il a été démontré que le refroidissement avec des sacs de glace se traduit par des temps de refroidissement plus longs par rapport aux méthodes d’évaporation, mais lorsque les deux sont appliqués simultanément, les vitesses de refroidissement augmentent.13,14 La simplicité et la sécurité de l’application de sacs de glace en font un choix favorable à utiliser en conjonction avec d’autres méthodes de refroidissement.

Méthodes de refroidissement invasif

Les méthodes de refroidissement invasif, y compris le lavage péritonéal et gastrique, se sont révélées efficaces dans un modèle canin, mais pas plus que les méthodes d’évaporation.13,14 Bien qu’il y ait eu des cas signalant l’utilisation réussie du refroidissement intravasculaire pour HS,16 il manque d’études confirmant son intérêt dans le coup de chaleur. Il faut également prendre en compte les risques associés à la mise en place d’un cathéter de refroidissement chez un patient avec potentiellement une coagulopathie. Les avantages possibles du refroidissement intravasculaire incluent un refroidissement rapide et précis, ainsi que des options pour la surveillance invasive de la pression veineuse centrale et une voie veineuse centrale pour l’’administration de médicaments. Une utilisation correcte empêchera également le développement de l’hypothermie de rebond. La perfusion de solutés intraveineux froids à 4°C a étonnamment été peu décrite dans la littérature, mais il s’agit d’un traitement simple et efficace qui devrait également être pris en considération.

Figure 2.

Figure 2. Résumé de la prise en charge en urgence et des méthodes de refroidissement pour le coup de chaleur

Autres Traitements

Malgré l’implication des cytokines pyrogènes, les thérapies pharmacologiques telles que le paracétamol et les anti-inflammatoires non stéroïdiens n’ont pas de rôle dans la prise en charge du coup de chaleur. Ils ne se sont pas avérés bénéfiques et ils devraient être évités car ils peuvent avoir des effets néfastes sur la fonction rénale et hépatique ainsi que potentiellement exacerber toute coagulopathie.2,5,14
Bien que le dantrolène ait été utilisé avec succès dans le traitement de l’hyperthermie maligne, rien ne prouve son intérêt dans le traitement du coup de chaleur.2,4,13,14,17 Cependant, il existe un argument selon lequel le coup de chaleur et l’hyperthermie maligne font partie d’un syndrome de stress thermique plus large.17 Un certain nombre de patients qui ont souffert d’un coup de chaleur ont ensuite été testé positif pour l’hyperthermie maligne, et la température centrale des patients souffrant d’hyperthermie maligne augmente plus que chez les personnes non affectées lors de l’exercice. Comme il est possible que le coup de chaleur par l’exercice et l’hyperthermie maligne soient deux maladies du spectre de thermorégulation altérée, le dépistage de l’hyperthermie maligne est conseillé après un épisode de coup de chaleur causé par l’exercice.4 Les immunomodulateurs, y compris les antagonistes des récepteurs interlukin-1, les anticorps anti-endotoxines et les corticostéroïdes, semblent prometteurs dans le traitement du coup de chaleur, démontrant une meilleure survie dans les modèles animaux. Cependant, comme il n’y a pas eu d’essais humains, leur utilisation ne peut être recommandée. 2

Conclusion

Dans le monde entier, le coup de chaleur continue d’être une cause de morbidité et de mortalité significative. Un indice élevé de suspicion clinique est nécessaire chez les patients ayant un état mental modifié et une histoire d’exposition à des températures ambiantes élevées ou une activité intense. Le refroidissement rapide et la réanimation sont les piliers du traitement. Bien qu’il n’y ait pas actuellement de consensus sur les méthodes de refroidissement à utiliser, le jugement clinique devrait être utilisé pour sélectionner les patients appropriés pour l’immersion dans l’eau froide si cela est disponible. D’autres patients peuvent bénéficier d’une combinaison de méthodes de refroidissement, y compris la perfusion de cristalloïdes froids, le refroidissement par évaporation et l’irrigation de l’estomac et de la vessie par des liquides froids. Les avantages possibles du refroidissement intravasculaire seront avérés par des recherches supplémentaires, quoique que les données disponibles soutiennent l’efficacité de ce traitement. À l’heure actuelle, il n’existe pas de traitements pharmacologiques qui se soient révélés efficaces pour le coup de chaleur.

REPONSES AUX QUESTIONS

  1. Concernant la dissipation de la chaleur et la thermorégulation:
    1. Vrai
    2. Faux: Le refroidissement par convection et non par conduction peut être amélioré par une augmentation de la vitesse du flux d’air sur la peau
    3. Vrai: L’augmentation du gradient de pression de vapeur entre la peau et l’environnement facilite le refroidissement par évaporation. En pratique, cela peut se faire en aspergeant d’eau la peau du patient. Dans les zones à forte humidité, la pression de vapeur est élevée et cela amoindrit l’évaporation.
    4. Faux: L’évaporation de la transpiration est la méthode la plus efficace de perte de chaleur.
    5. Faux: Le contrôle central de la thermorégulation est situé au niveau de l’hypothalamus.
  2. Concernant le diagnostic de coup de chaleur:
    1. Faux: Bien qu’une température >40°C et un contexte suggestif peut aider à poser un diagnostic de coup de chaleur, un refroidissement pré-hospitalier peut déjà avoir eu lieu. Il est imprudent de s’en tenir strictement à ce critère.
    2. Faux: Bien que plusieurs patients soient hypotendus, ceci n’est pas une caractéristique principale du coup de chaleur. Cependant c’est un signe utile qui peut aider à faire la différence entre le coup de chaleur et l’hyponatrémie (conduisant au trouble du système nerveux central) secondaire à l’intoxication hydrique. Cette dernière peut être normo- ou hypertensive.
    3. Vrai: Tous les patients présentant un coup de chaleur ont un état mental altéré qui peut aller de la confusion et l’irritabilité au coma.
    4. Faux: La syncope de chaleur est causée par la vasodilatation, elle-même causée par la haute température ambiante. Faiblesse, nausée et vomissement sont tous des symptômes de l’épuisement dus à la chaleur. En cas d’épuisement dû à la chaleur, il n’y a pas de lésion tissulaire et le patient aura une température centrale normale, à la différence d’un coup de chaleur.
    5. Vrai: A moins qu’il n’y ait des anomalies physiologiques ou de traitements en cours (ex: des bêta bloquants), les patients sont presque toujours tachycardes.
  3. Concernant les facteurs de risque et le traitement du coup de chaleur:
    1. Faux: Le dantrolène n’a pas montré de bénéfice chez le patient présentant un coup de chaleur.
    2. Vrai: Les diurétiques peuvent prédisposer à la déshydratation et sont un facteur de risque pour les coups de chaleur.
    3. Vrai: Le sexe féminin est protégé des coups de chaleur. Les raisons ne sont pas claires mais les théories en cours évoquent en effet protecteur des oestrogènes, un seuil plus bas de déclenchement des mécanismes de thermorégulation et une plus petite masse musculaire.
    4. Faux: Le paracétamol n’a pas montré d’efficacité pour aider au refroidissement, il devrait être évité à cause du risque d’hépatotoxicité.
    5. Faux: Habituellement le refroidissement actif devrait s’arrêter à 39.0°C afin d’éviter l’hypothermie de rebond. Cependant les nouvelles techniques de refroidissement tels que les dispositifs de refroidissement intra-vasculaires permettent un meilleur contrôle de la température et pourraient n’être arrêtés que quand la température corporelle atteint 37°C.

REFERENCES ET AUTRES LECTURES

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Traduit de l’anglais par Philippe Mavoungou, MD,

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